RETRAITE, travailler les apparences pour masquer le fond

PROJET DE LOI DE REFORME DES RETRAITES TRAVAILLER LES APPARENCES POUR MASQUER LE FOND

Ainsi, pour des raisons liées aux règles de fonctionnement des assemblées parlementaires, le Gouvernement vient de déposer un « projet de loi de financement rectificative de la Sécurité Sociale pour 2023 » comprenant la plupart des mesures destinées à réaliser quelques « économies » au compte des retraites, pour « réduire les déficits » et ainsi « préserver le régime de retraite par répartition auquel tous les Français sont attachés ».

Comme cela fait le huitième texte, depuis 1993 et la loi Balladur, portant sur le sujet, que l’on sait qu’il y aura un second texte dans l’année pour résoudre certains aspects du dossier et qu’il est probable que l’on aura un neuvième texte avant cinq ans, on peut légitimement nourrir quelques interrogations, si ce n’est inquiétudes.

LE DECOR DE FOND

Le projet de loi est donc une loi de financement de la Sécurité Sociale.

On observera de suite que ce choix, guidé par le souci de « gagner du temps » du point de vue du Gouvernement, n’est pas sans présenter quelques risques.

Ce qui a évidemment provoqué l’invocation de l’article 47 de la Constitution ci après reproduit

Le Parlement vote les projets de loi de finances dans les conditions prévues par une loi organique.

Si l’Assemblée nationale ne s’est pas prononcée en première lecture dans le délai de quarante jours après le dépôt d’un projet, le Gouvernement saisit le Sénat qui doit statuer dans un délai de quinze jours. Il est ensuite procédé dans les conditions prévues à l’article 45.

Si le Parlement ne s’est pas prononcé dans un délai de soixante-dix jours, les dispositions du projet peuvent être mises en vigueur par ordonnance.

(fin de citation)

Ce choix peut se trouver justifié puisque l’article LO 111-3-12 du code de la Sécurité Sociale stipule (je cite de nouveau)

Peuvent figurer dans la loi de financement rectificative les dispositions relatives à l’année en cours :

1° Ayant un effet sur les recettes des régimes obligatoires de base ou des organismes concourant à leur financement, à l’amortissement de leur dette ou à la mise en réserve de recettes à leur profit, relatives à l’affectation de ces recettes, sous réserve du III de l’article 2 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances, ou ayant un effet sur les dépenses de ces régimes ou organismes ;

2° Relatives à l’assiette, au taux et aux modalités de recouvrement des cotisations et contributions affectées aux régimes obligatoires de base ou aux organismes concourant à leur financement, à l’amortissement de leur dette ou à la mise en réserve de recettes à leur profit ;

3° Relatives à la trésorerie et à la comptabilité des régimes obligatoires de base ou des organismes concourant à leur financement, à l’amortissement de leur dette ou à la mise en réserve de recettes à leur profit ;

4° Ayant un effet sur la dette des régimes obligatoires de base, sur l’amortissement et les conditions de financement de cette dernière ainsi que les mesures relatives à la mise en réserve de recettes au profit de ces mêmes régimes et à l’utilisation de ces réserves ;

5° Si elles ont pour effet de modifier les conditions générales de l’équilibre financier de la sécurité sociale, ayant un effet sur :

a) La dette des établissements de santé relevant du service public hospitalier ;

b) La dette des établissements médico-sociaux publics et privés à but non lucratif financés en tout ou partie par les régimes obligatoires de base de sécurité sociale et soumis à un objectif de dépenses ;

6° Modifiant les règles relatives à la gestion des risques par les régimes obligatoires de base ainsi que les règles d’organisation ou de gestion interne de ces régimes et des organismes concourant à leur financement, si elles ont pour objet ou pour effet de modifier les conditions générales de l’équilibre financier de la sécurité sociale ;

7° Rectifiant la liste des régimes obligatoires de base et des organismes concourant à leur financement habilités à recourir à des ressources non permanentes ainsi que les limites dans lesquelles leurs besoins de trésorerie peuvent être couverts par de telles ressources ;

8° Améliorant l’information et le contrôle du Parlement sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale.

(fin de citation)

Sans commenter l’ensemble des points ici relevés en détail, il suffit juste de se dire qu’une loi de financement rectificative peut très bien porter sur autre chose que le seul champ de l’assurance vieillesse et, partant, que l’opposition parlementaire peut opter pour une « obstruction intelligente » revenant sur les enjeux de santé publique par propositions sur l’assurance maladie, de politique familiale avec les allocations familiales ou encore les recettes de la Sécurité Sociale, notamment les allégements et exonérations de cotisations sociales dont le coût se mesure aujourd’hui en bas salaires et, apparemment, de faible productivité du travail…

Quant à la forme de « priorité » accordée au traitement de la question de l’assurance vieillesse, on relèvera ici qu’il s’agit de la branche de la Sécurité Sociale la moins « fiscalisée », le principal des recettes des régimes légaux obligataires (pour ne pas oublier les fonctionnaires d’État ou des collectivités locales par exemple) est constitué de cotisations.

Ainsi, le régime général, qui devrait encaisser 126 Mds de cotisations cette année pour un ensemble de 156 Mds d’euros de ressources.

On est loin de la branche autonomie, financée à près de 90 % par la CSG et pour le solde par d’autres impôts (notamment la contribution générée par le Lundi de Pentecôte)

Cette orientation est, de mon point de vue, porteuse de sens.

Il va sans dire que le choix du Gouvernement est également guidé par la volonté politique de « doubler «  le mouvement de contestation sociale qui monte et s’est déjà exprimé depuis l’annonce de la « réforme ».

Réforme, une sorte de gros mot dont certains devraient songer à réduire l’usage, la notion de recul social ayant quelque peu tendance à en devenir l’homonyme.

LE PROJET DE LOI

Le texte soumis au Parlement comprend vingt articles et obéit aux règles fixées par les lois de financement de la Sécurité Sociale ;

De manière liminaire, examen du cadrage macro économique du texte, avec les variations qu’il implique dans les comptes de la Sécurité Sociale tels que votés en loi de financement initiale.

Puis mesures relatives aux recettes.

Ainsi, l’article premier supprime, pour l’assurance vieillesse, la spécificité de cinq régimes spéciaux, à savoir celui des industries électriques et gazières (en gros, la retraite des agents d’EDF GDF), celui de la RATP, celui de la Banque de France, celui des agents du Comité Economique Social et Environnemental et celui de la CRPCEN (Caisse de Retraite et de Prévoyance des Clercs et Employés de Notaires).

Le lecteur ne sera pas surpris d’apprendre que ces cinq régimes dégagent aujourd’hui des excédents et qu’ils seront donc dégradés au fil du temps, puisque les personnels actuellement placés sous statut vont progressivement faire valoir leurs droits à pension et que la cotisation des nouveaux entrants va alimenter le régime général.

On notera par ailleurs que plusieurs de ces régimes disposent de ressources fiscales affectées.

C’est le cas pour la CRPCEN, puisque la Caisse perçoit une partie des « frais de notaire » affectant les opérations de rédaction des actes notariés. 

C’est aussi le cas pour le régime des industries électriques et gazières puisque la Caisse de retraite perçoit, pour son compte, la Contribution Tarifaire d’Acheminement (plus d’1,1 Md d’euros) qui pourra de fait être « acheminée «  vers sa disparition, puisqu’elle faisait partie du mode de financement des droits spécifiques des agents avant la réforme de 2004 qui a modifié le statut d’EDF.

Quant il n’y aura plus d’agents EDF sous statut 1946 en activité, ce sera plus facile…

Le cas du régime de la Banque de France est plus complexe, puisqu’il comporte une part non négligeable de « capitalisation », celle ci représentant en effet le quart des ressources du régime.

La caisse a provisionné ses engagements depuis 2006, notamment parce qu’une partie des résultats (qui auraient pu être distribués aux agents de la Banque) a été capitalisée dans l’institution de retraite.

Elle dispose aujourd’hui de 15 Mds d’euros de réserves, selon un rapport de la Cour des Comptes, ce qui semble motiver l’initiative gouvernementale.

Notons également que d’autres régimes spéciaux ne sont pas ainsi « captés » par la réforme.

Il s’agit notamment du régime géré par l’Etablissement National des Invalides de la Marine (retraités de la marine marchande), régime très largement fiscalisé puisque 80 % de son budget découle d’une subvention d’équilibre de l’État.

Le régime présente une situation très déséquilibrée avec un peu plus de 25 000 cotisants et plus de 100 000 retraités.

Comme la France a, il y a quelques années, fait le choix de développer un « pavillon de complaisance » (en l’espèce le fameux pavillon Kerguelen), les navires battant pavillon français sont de plus en plus rares.

Autres régimes non concernés par le texte : celui de la Comédie Française et celui de l’Opéra de Paris.

Il s’agit de régimes à faible niveau de cotisants (moins de 2 000) qui tiennent compte des spécificités des métiers.

Imagine t on le Cygne Noir du Lac des Cygnes ou le Prince Charmant de la Belle au bois dormant interprétés par un danseur de 62 ans ?

Enfin, deux régimes sont situés hors champ de la réforme, à savoir celui des professions libérales et, surtout, celui de l’agriculture (régime des exploitants comme celui des salariés).

Concession probable au fonds de commerce électoral de Renaissance et des Républicains…

L’article 2 du projet de loi crée le fameux « index de l’emploi des seniors »censé mesurer les conditions du maintien dans l’emploi des salariés âgés.

La mesure n’est guère contraignante, l’article laissant même aux partenaires sociaux le choix des critères de mesure retenus et ne prévoyant comme sanction que … la non publication de l’index.

A noter que l’index est limité aux entreprises de plus de 300 salariés, ce qui réduit d’autant plus le champ de l’affaire, d’autant que ne semble pas posée la question des établissements secondaires de groupes comptant plus de 300 salariés.

Ceci posé, cet index ne sera pas obligatoire avant juin 2024…

L’article 3 consacre l’abandon de la réforme consistant à inclure le recouvrement des cotisations AGIRC ARRCO dans le champ de compétences des URSSAF. Il n’appelle donc pas de commentaire particulier.

Sinon que les partenaires sociaux, gestionnaires des caisses de retraite complémentaires, ne semblent pas avoir eu confiance…

Et que les réserves des régimes complémentaires obligatoires sont assez bien garnies (environ 70 Mds d’euros) et le résultat 2022 largement positif (près de 4 Mds d’euros)

L’article 4 présente un tableau d’équilibre des comptes de la Sécurité Sociale, détérioré de 400 millions d’euros par les premiers effets de la réforme présente.

Et l’article 5 consacre l’objectif d’amortissement de la dette sociale à hauteur de 17,7 Mds d’euros, payés à la fois par la CRDS et une part de la CSG.

Notons ici ce que dit l’exposé des motifs de l’article.

En 2023, la dette restant à amortir par la caisse d’amortissement de la
dette sociale (CADES) devrait s’élever à 146,1 milliards d’euros,
241,6 milliards d’euros ayant déjà été amortis par la caisse.


Le transfert de dette sociale à la CADES prévu par l’article 1er de la loi du 7 août 2020 relative à la dette sociale et à l’autonomie s’est poursuivi en 2022 à hauteur de 40 milliards d’euros, venant réduire le besoin de financement induit par la crise sanitaire liée à l’épidémie de covid-19

( fin de citation)

En français courant, cela signifie que la « dette sociale » est maîtrisée malgré un accroissement lié au virement, au passif de la CADES, des déficits sociaux enregistrés notamment pendant la crise sanitaire.

L’autre aspect, c’est qu’il reste du grain à moudre pour « consolider » la dette ultérieure qui proviendrait de déficits constatés sur l’assurance maladie ou l’assurance vieillesse.

On relèvera que le montant du passif de la CADES (141,6 Mds d’euros) constitue l’équivalent du versement de 8,3 années.

Ce qui donne les années 2024, 2025, 2026, 2027, 2028, 2029, 2030, 2031 alors que la disparition de la CRDS est prévue en 2033.

Comme le disait le rapport sur les comptes de la Sécurité Sociale en 2020 dans l’un des scenarii d’amortissement.

En clair, avec sa réforme des retraites, le Gouvernement a l’intention de faire payer deux fois aux assurés sociaux le même déficit, outre de verser 2 à 3 Mds par an d’intérêts…

L’article 6 consiste à valider le rapport annexe rattaché au projet de loi, retraçant les conséquences des mesures contenues dans les différents articles.

La lecture de ce rapport donne quelques indications supplémentaires sur le sens profond de la réforme.

Je cite

Dans le champ des régimes de base de retraite, la trajectoire intègre les dispositions présentées dans la présente loi, portant une hausse progressive de l’âge d’ouverture des droits (AOD) de soixante deux à soixante quatre ans, au rythme d’un trimestre par génération à compter du 1er septembre 2023, et une accélération de la durée d’assurance requise (DAR), au rythme d’un trimestre par génération, contre un trimestre toutes les trois générations jusqu’à présent. La trajectoire intègre également des mesures d’accompagnement et de hausse des minima de pensions. Ces mesures viseront en premier lieu à dispenser de la hausse de l’AOD les personnes inaptes au travail ou reconnues invalides. Elles permettront également aux assurés ayant commencé à travailler précocement de partir plus tôt que l’âge de droit commun avec notamment un renforcement du dispositif « carrières longues », développeront les transitions entre l’activité et la retraite et amélioreront les dispositifs de prévention et de réparation de l’usure professionnelle.

Enfin, les minima de pension seront revalorisés pour les nouveaux retraités à partir de 2023 mais également pour ceux déjà partis à la retraite et bénéficiant du minimum contributif.

La réforme emporte également des mesures en recettes, avec des hausses des taux des cotisations vieillesse dues par les employeurs publics (CNRACL) et par les employeurs privés, cette hausse étant compensée pour ces derniers par une baisse à due concurrence des cotisations AT MP. La présente annexe porte sur le champ des régimes obligatoires de base et du FSV à l’horizon 2026, mais la réforme des retraites présentée dans la présente loi de financement rectificative de la sécurité sociale aura des impacts financiers qui monteront en charge au delà de 2026, ainsi que sur les régimes complémentaires. Le système de retraite pris dans son ensemble retournera ainsi à l’équilibre à l’horizon 2030. Une étude d’impact financière spécifique a été jointe au projet de loi.

(fin de citation)

On aura donc en ces quelques lignes un intéressant résumé du texte.

Pivots de la réforme : recul de l’âge de départ de deux ans, augmentation de la durée d’affiliation.

Conséquences : l’ensemble des dispositifs de départ anticipé eset repoussé de deux ans, ce qui signifie que l’âge légal actuel va être présenté demain comme une sorte de « privilège ».

Quant à l’affaire des 1 200 euros (revalorisation des minima), elle va se trouver financée par deux voies.

Un, une contribution des entreprises d’environ 1 Md d’euros qui sera compensée, à due concurrence, par une réduction de la contribution due au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles.

Ou comment l’on branche des tuyaux imprévus entre les branches de la Sécurité Sociale…

L’autre affaire, c’est la hausse de la cotisation CNRACL, c’est à dire le régime de retraite des agents des collectivités territoriales et des établissements hospitaliers.

Cela fait pas loin de 40 ans que cette Caisse de retraite est « mise à toutes les sauces » pour prendre en charge une partie de la politique sociale du pays, au-delà de sa mission naturelle, c’est à dire solder les pensions des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers.

La Caisse est un organisme où le ratio démographique est encore nettement positif (on se situe à deux cotisants pour un retraité) qui encaisse près de 23 Mds d’euros de cotisations et verse 22,8 Mds d’euros en prestations.

Elle se retrouve en déficit parce qu’elle est particulièrement sollicitée au titre de la compensation démographique inter régimes où elle a laissé, en 2021, 959 millions d’euros, après 1,25 Md l’année d’avant.

La hausse prévue de la cotisation employeur de la CNRACL n’a donc comme raison d’être que de permettre à l’État de se défausser sur les collectivités locales du financement des minima de pension.

Avec l’article 7, nous entrons enfin dans le vif du sujet avec la disposition prévoyant le recul de l’âge de la retraite à soixante quatre ans et l’accélération du passage aux quarante trois annuités.

Le principe est si simple qu’il faut ensuite vingt cinq paragraphes et cent soixante deux alinéas pour tirer les conséquences, dans un certain nombre de professions (et notamment les catégories actives de la Fonction Publique), de la modification des règles du jeu.

Je fais observer ici que le recul de l’âge de la retraite emporte, entre autres effets, un rétrécissement du délai entre âge légal d’ouverture des droits (AOD) et âge de mise en retraite d’office et/ou d’annulation de la décote.

Ce qui veut dire que, tendanciellement, les comptes de l’assurance vieillesse vont s’améliorer par une augmentation du montant des décotes sur pensions et une réduction du montant des surcotes.

Une sorte « d’effet ciseau » ou de supplice chinois assurant la réduction de la pension moyenne en valeur relative de remplacement des revenus d’activité.

L’autre effet systémique, c’est évidemment, l’amélioration du rapport années cotisées/années de perception de la pension.

Ou comment la réforme joue une partie de son équilibre sur les tables de létalité…

L’article 8 porte sur la question de la retraite anticipée des personnes handicapées, invalides du travail et autres catégories d’assurés souffrant de problèmes de santé récurrents.

L’article crée un droit à la retraite anticipée qui n’est que le maintien de l’âge de soixante deux ans pour faire jouer son droit à pension.

La grande avancée sociale de l’article est donc de porter de l’âge de 60 ans à celui de 62 ans le droit à retraite anticipée.

Un bel exemple de justice et d’équité, non ?

L’article 9 concerne la question de l’usure professionnelle.

Outre qu’il crée un fonds de prévention de l’usure professionnelle, et prévoit un certain nombre de mesures pour le suivi longitudinal des salariés exposés à des risques patents de pénibilité et d’usure, le tout passant entre autres par des accords dont les stipulations seront assez largement dépendantes de l’état des rapports de forces dans certaines professions, l’article vise, manifestement, à éviter autant que faire se peut la sollicitation de la branche AT – MP.

Branche la plus pénalisante et la plus révélatrice des pratiques du patronat…

Accessoirement, pour ceux qui auraient oublié de lire leur fiche de paie, il n’y a pas de « part ouvrière » dans les cotisations AT MP.

L’article 10 se préoccupe de la solidarité entre les régimes de retraite et notamment des moyens de financer le minimum contribution et le « rattrapage » des petites pensions.

La mesure passe entre autres par une réaffectation d’une partie du produit des accises sur les alcools au profit, si l’on peut dire, de la retraite agricole de base des exploitants.

Un même type de mesure est prévu pour le régime général, l’objectif étant de mener les pensions minimales à 85 % du SMIC, c’est à dire environ 1 200 euros.

L’article 11 ouvre droit à validation des périodes d’insertion professionnelle d’un certain nombre de personnes ayant connu, dans le courant des années 80, dans le cadre des politiques publiques de formation professionnelle.

Le présent article porte sur cinq dispositifs de stage de la formation professionnelle : les travaux d’utilité collective (TUC), les stages pratiqués en entreprise du plan Barre (1977-1988), les stages « jeunes volontaires » (1982-1987), les stages d’initiation à la vie professionnelle (1985-1992) et les programmes d’insertion locale (1987-1990). Près de 1,7 million d’assurés ont participé à un contrat TUC entre 1984 et 1990 et près de 1,15 million de personnes ont intégré les quatre autres dispositifs entre 1977 et 1992.

La reconnaissance, même un peu tardive, de ces stages est une bonne mesure mais d’un coût limité et ne risque en fait que de compléter une carrière où il manquerait quelques trimestres.

L’article 12 porte sur la question des aidants.

Il vise, dans un premier temps, à modifier la répartition des ressources fiscalisées de la Sécurité Sociale en faisant glisser quelques éléments de la taxe sur les salaires dédiée à la branche famille vers la branche autonomie.

C’est à dire que la prise en compte du rôle des aidants dans le calcul des pensions et retraites se fera à coût constant, puisque le succès potentiel de la mesure sera probablement gagé, à l’avenir, sur une nouvelle répartition du produit de la taxe sur les salaires.

Et, accessoirement, sur la réduction du crédit d’impôt « emplois à domicile ».

Avec l’article 13, nous sommes au bout des articles « novateurs «  du projet de loi, avec une série de mesures favorisant la transition entre emploi et retraite.

Il s’agit de donner des droits nouveaux aux personnes cumulant emploi et retraite (500 000 aujourd’hui), une situation que la dégradation du taux de remplacement des pensions, induite par le texte, risque de généraliser.

Et, ensuite, de favoriser le développement de la retraite progressive.

On rappellera à ce sujet que des dispositifs de cessation progressive d’activité ont existé, dans le passé, notamment dans la fonction publique et que leur suppression a, manifestement, pesé sur l’évolution de la pyramide des âges dans le secteur public…

Il me semble cependant qu’un tour de négociation collective sur les fins de carrière serait assez bienvenu, plutôt que le bricolage circonstancié prévu par le projet de loi.

Avec les articles 14 à 20, nous voici face aux articles prévoyant les premières conséquences financières de la réforme.

L’article 14 relève ainsi le budget de l’assurance maladie de 100 millions en dépenses, du fait de la prise en compte de « l’usure professionnelle ».

L’article 15 consacre un ONDAM en baisse sur 2022, du fait du moindre impact de la crise sanitaire.

L’article 16 maintient le budget AT MP au niveau voté en loi de financement.

L’article 17 consacre le budget prévisionnel de la caisse nationale d’allocations familiales (55,3 Mds de dépenses prévues) avec une hausse assez sensible, la part des transferts avec l’assurance vieillesse étant loin d’être secondaire pour ce qui concerne les majorations pour enfants ou encore la prise en charge APVF.

L’article 18 consacre l’inscription d’un total de 37,5 Mds au budget d’une branche autonomie qui n’est pas encore parfaitement équilibrée, quelques années après sa création.

L’article 19 précise la charge laissée au compte du Fonds de Solidarité Vieillesse (FSV), instrument qui se préoccupe entre autres de solder l’équivalent des cotisations des chômeurs.

La situation du Fonds appelle quelques remarques.

Le Fonds semble revenu à une situation excédentaire en 2022.

Chargé en effet de financer les cotisations théoriques liées au chômage, à la formation, à la maladie et une partie du minimum vieillesse, il a été particulièrement alimenté cette année par la CSG sur les produits de placement et du patrimoine, signe de l’indécence des marchés financiers.

Ainsi, la CSG revenus du capital est passée de 17,9 à 19,5 Mds d’euros…

Le Fonds, dont la dette a été « consolidée «  au passif de la CADES, devrait donc présenter une position de report à nouveau positif, situation inconnue depuis 2001.

Peut être de quoi trouver le financement de nouvelles prestations ou de cotisations fictives ?

Enfin l’article 20 consacre la hausse de 400 millions du budget de l’assurance vieillesse, conséquence du projet de loi.

Mais cela ne durera pas…

(la suite au prochain numéro)