Il est de bon ton, dans certains milieux, et notamment quand s’approchent les débats budgétaires, de revenir sur le surplus, et voire l’excès, de dépenses publiques, raison principale du déficit des comptes de l’Etat au delà de toute autre considération.
Cette critique vise singulièrement les dépenses sociales et notamment celles liées aux minima sociaux, qu’un Président a pu qualifier un jour de « pognon de dingue ».
Nombre de fausses nouvelles ou d’histoires à peine croyables alimentant les réseaux sociaux servent, dans le même ordre d’idées, à accréditer certaines croyances populaires qui masquent en fait assez mal à la fois une peur panique des intéressés de se retrouver un jour en situation d’allocataire mais aussi une forme de racisme autant ethnique que social, l’assimilation étant vite produite entre « profiteurs » des revenus concernés et personnalités d’origine ou de nationalité étrangère.
Le même débat traverse notamment la question de l’aide médicale d’Etat (qui n’est pas un minimum social) et participe d’ailleurs bien souvent des mêmes arguments fielleux et au demeurant inexacts sur le fond et la forme.
Nous disposons pourtant, avec les études et rapports du service statistique du Ministère des Solidarités, la DREES, des moyens d’appréhender la réalité des choses.
Selon le dernier rapport publié par cette Direction, celui concernant les données 2021 (le décalage est en partie lié, faut il le rappeler, au fait que les allocations en question font l’objet, en général, de procédures contradictoires et qu’elles nourrissent un contentieux qui ne permet pas la stabilisation en temps réels des données), un peu plus de 4,2 millions de ménages disposent d’un minima social dont 1,9 millions pour le RSA, 1,2 million pour l’allocation adulte handicapé et plus de 600 000 pour le minimum vieillesse.
L’ensemble de ces allocataires a disposé d’environ 30 Mds d’euros de revenus, soit une moyenne mensuelle de 572 euros directement liquides.
On rappellera ici que si les allocataires de ces minima peuvent disposer d’une aide au logement, celle ci n’est pas assimilable à un revenu, puisqu’elle est versée le plus souvent directement au bailleur.
C’est là un point qu’il convient de rappeler puisque nombre de contempteurs de la dépense publique mélangent allègrement les revenus monétaires directs et le tiers payant…
On notera cependant l’essentiel de ces données,
A savoir que la pauvreté monétaire semble frapper beaucoup plus jeune qu’avant puisque le minimum vieillesse concerne quatre à cinq fois moins de familles que lors de sa création, notre système de retraite, malgré tous ses défauts, a sorti de la grande pauvreté une grande majorité de retraités.
Ce qui n’empêche qu’on observe une hausse relative du nombre des allocataires depuis quelques années, sous les effets des réformes successives du système de retraite…
Mais nous avons une société et une économie qui continuent d’exclure les travailleurs handicapés et de les mettre au chômage avant qu’ils ne soient en retraite…
C’est ce qui oblige l’Etat à mobiliser 30 Mds pour poser un couvercle sur la marmite bouillonnante des inégalités.
Ah oui, 30 Mds, c’est aussi la somme que l’Etat a remboursé aux entreprises redevables de l’impôt sur les sociétés, au titre des acomptes de l’impôt brut et des dispositifs correctifs plus ou moins chiffrés.
Et leur mise en question est bien insuffisante pour réduire durablement les déficits publics qui occupent tant les partisans de la « vérité budgétaire »…