Elections britanniques : le triomphe paradoxal du parti travailliste

Convoquées par le Premier Ministre conservateur Richi Sunak pour ce 4 juillet, les élections générales britanniques ont livré un verdict assez largement attendu dans les sondages, à savoir la victoire du Labour Party, quelque peu recentré par Keir Starmer après la période Corbyn, placé dans l’opposition depuis quatorze années.

C’est bien évidemment l’ampleur de la victoire travailliste qui a retenu l’attention, puisque le Labour a finalement obtenu 412 sièges sur les 650 offert aux Communes, doublant sa représentation jusque là limitée à 202 sièges.

Une progression qui affecte toutes les Régions du pays (sauf l’Irlande du Nord), mais qui se fonde sur une modeste progression en pourcentage de 1,6 %, masquant mal une perte en voix, de 564 396 suffages.

Mais les Conservateurs ont perdu 258 élus, disparaissant de la délégation galloise, se trouvant réduits à 5 élus en Ecosse et disparaissant largement de la carte électorale du Grand Londres .

Ils n’y retrouvent que 9 élus sur Bromley and Biggin Hill (majorité de 302 voix), Croydon South (majorité 2 313 voix), Orpington, Old Bexley and Sidcup, Romford, Hornchurch and Upminster, Chingford and Woodford Green, Harrow East et Ruislip, Northwood and Pinner, tous sièges définis sur le pourtour extérieur de l’agglomération londonienne.

Les Conservateurs perdent des sièges comme celui de Chelsea and Fulham (pour 152 voix, avec une baisse de 6,4 % de leur score), celui des Cities of London and Westminster (majorité travailliste de 708 voix).

Pour faire bonne mesure, ils perdent aussi, au profit des Libéraux Démocrates, les sièges de Wimbledon, Twickenham et Epsom, qui évoquent certains sports britanniques autant que la vie politique locale.

Les Conservateurs ont surtout perdu des positions dans ce qui étaient leurs fiefs de l’Angleterre rurale, résidentielle et notamment dans les parties Sud et Sud Est du pays.

Parmi les pertes subies, notons ici le siège de Douvres, celui de Folkestone, les sièges de Milton Keynes.

Notons aussi le fait que Cambridge a réélu un député travailliste, comme Oxford et Bath un député libéral démocrate, un parti libéral démocrate qui a raflé largement les sièges ruraux autour des deux grandes cités universitaires, et notamment ceux des Costwolds autour d’Oxford.

Dans les grandes régions de tradition ouvrière du pays, le succès du Labour est large.

Les travaillistes dominent ainsi largement au Nord Est (Middlesbrough, Hartlepool, Scarborough, Newcastle, Durham) comme sur la partie Nord Ouest (Liverpool, Manchester, Sheffield) ou dans les Midlands (Birmingham).

Certains indépendants, à l’instar de James Corbyn, réélu à Islington North avec 49 % des voix, ont été élus, notamment à Blackburn où le travailliste dissident obtient 132 voix de plus que la candidate officielle.

Dans cette circonscription, un candidat du Workers Party obtient plus de 7 000 voix et 18 %.

Au Pays de Galles, comme nous l’avons signalé, le Labour a fait disparaître toute représentation conservatrice, les Tories perdant leurs douze députés sortants.

En Ecosse, les difficultés du Parti National Ecossais, très largement vainqueur lors du précdent scrutin, ont conduit à un sensible basculement de la représentation, la nation celte redevenant le fief travailliste qu’elle a longtemps été.

Le Labour est ainsi passé de 1 à 37 sièges, raflant notamment tous les élus de Glasgow, les Tories étant repoussés sur les Borders (où ils disposent des trois sièges le long de la frontière avec l’Angleterre) et les zones rurales derrière Aberdeen.

En Irlande du Nord, le Sinn Fein, avec 7 élus, est devenu le parti le plus influent avec plus de 27 % des votes.

Au final, c’est la présence du parti de la Réforme, mené par le politicien d’extrême droite Nigel Farage, élu en East Anglia qui, en retenant sur ses candidats 14 % des voix, qui a coûté fort cher aux Tories, dont l’électorat s’est divisé.

Ce qui est irrémédiable dans un système politique au scrutin « first past to post », à un tour.

Car, nous l’avons vu, c’est avec un nombre de voix inférieur à celui obtenu il y a cinq ans que le Labour a emporté sa plus forte majorité depuis …1945.